mardi 31 mai 2011

La Renaissance avec Assassin's Creed II et III

J'ai gagné une XBox 360 par la communauté européenne il y a 2 ans dans l'objectif affiché de me faire jouer en classe. Elle était accompagnée de deux jeux (enfin non : 4, deux de chaque) : Shrek le troisième et Bee Movie le jeu. J'étais à l'époque enseignante en collège et j'ai joué aux deux jeux à fond à fond à fond (jusqu'au sommeil agité de la gameuse qui continue à défoncer ses adversaires à coup de tonneaux et de pets mortels). Et je n'ai jamais trouvé ce que je pouvais en faire dans mes cours d'histoire et de géographie, ni même d'éducation civique.

Cette année en lycée, des élèves de seconde m'ont prêté Assassin's Creed II pour préparer un cours sur la Renaissance. Comme l'expérience de Shrek m'avait suffi, j'ai proposé à ces élèves de préparer cette séquence avec eux. Je vais ici vous la présenter, et en faire le bilan puisque nous l'avons mise en place cette semaine.
J'ajoute qu'avec ma proviseure nous avons concocté une lettre aux parents qui a été signée par tous.



Séquence telle qu'annoncée aux élèves et telle que réalisée :  

1- Le cours sur la Renaissance et l'Humanisme qui permet de dégager les grandes lignes de définition de ces deux notions.
2- Une analyse du tableau "l'école d'Athènes" sur le thème "en quoi ce tableau est-il caractéristique de la Renaissance, histoire (avouée en présentant la séquence) de s'exercer à confronter un document historique à la définition de la notion.
3- La séance de jeu, une heure présentée comme suit (avec trois consoles prévues, branchées sur télés et vidéo proj) :
  • objectif : les jeux vidéo utilisent souvent un cadre historique présenté comme réaliste et très documenté. Dans quelle mesure la réalité historique est-elle prise en compte dans un jeu vidéo ? Pour ce faire, nous allons jouer au jeu Assassin's Creed en transformant le scenario du jeu qui, à la base, repose sur l'assassinat (donc on va éviter !). 
  • scenario et missions : 
  • Scenario ACII III
  • A la fin de la séance, prendre 30 minutes pour : 
    • discuter des éléments que nous avons trouvés dans le jeu
    • comparer avec des documents historiques





















Et encore la visite virtuelle de la chapelle Sixtine

    • Analyser ce qui est solidement documenté (le décor, les informations biographiques, les documents) et ce qui relève de la fiction (les relations entre les personnages, le scenario, le "gameplay")
Bon, j'avoue que j'étais assez contente de moi et j'étais contente de mettre en œuvre ce travail réalisé avec mes deux élèves. 
Mais bon.

La mise en oeuvre

"Ouais moi je viens pas c'est nul" (Roselyne, je change les prénoms pour pas qu'on les reconnaisse et j'en profite pour me venger)

"Ah ben j'ai oublié de ramener la X-box... et les jeux, aussi". Séance avec une seule console pour trente élèves, donc. Merci Sébastien ! (oui bon lui je suis sympa avec lui il a quand même préparé la séance)

Me voilà donc à installer, en remplacement de deux X-box, mon ordi avec :
- une vidéo du début du jeu sur Youtube pour la mission 1

- la visite virtuelle de la chapelle Sixtine pour la mission 3

Mais voilà... les garçons jouent, c'est chouette, c'est ce qu'on leur demande ; deux filles suivent les deux écrans et remplissent leur fiche, et les autres... dorment, papotent et finalement se révoltent que "c'est nul on fout rien" (dixit Gertrude).
Alors, comprenant bien qu'un travail scolaire leur conviendrait mieux, je leur demande de me trouver dans la reconstitution 3D de la chapelle sixtine la scène où Dieu crée l'homme, de me la décrire et de me l'analyser, suivant la fiche méthode distribuée et testée le matin même. Héhé. Ben non plus.

La mise en commun faite dans un brouhaha insupportable, montrant un intérêt tout à fait limité pour la séance.
Comme quoi je ne faisais pas du tout appel aux jeu vidéo pour leur faire plaisir, mais ça ne leur a pas fait plaisir non plus ;-)

Comment j'analyse ce mauvais accueil ?

Au delà de : "c'est la fin de l'année", "un rattrapage de cours", "ceux qui ont été pénibles le sont aussi d'habitude". 
  • C'est un jeu. Et dans l'école traditionnelle à laquelle ces élèves sont habitués, un jeu ça ne vaut rien. J'ai beau leur dire que ça vaut autant qu'un film de fiction à base historique, ça vaut rien de rien. 
  • Le jeu vidéo demande quand même un certain savoir-faire autrement dit : la manette est aux mains de ceux qui savent. Il faudrait ajouter dans le scenario la nécessité de collaborer avec le groupe pour que ceux qui n'ont pas la manette jouent aussi. 
  • Les questions matérielles s'anticipent encore plus que d'habitude : une console ne se connecte pas au vidéo projecteur comme un ordi. Les élèves savent le brancher (parce que moi, euh...) mais comme c'est différent de chez eux, ils tâtonnent. Et merci Florian et les autres qui ont tout tenté ... et réussi. 
Sûrement d'autres choses encore mais je n'ai plus de batterie et j'ai laissé mon alimentation au lycée.

jeudi 19 mai 2011

Un (autre) bonheur de prof : l'esprit critique en action

Un bonheur de prof sans techno (si si c'est possible !)
ECJS en seconde. Sujet choisi par mes secondes : les sans-papier. 
Aujourd'hui c'est jour d'exposé, en préparation du débat. Les groupes sont plus ou moins prêts mais passent, quand même. Julie est en train de présenter les problèmes posés par les sans-papier à la société française quand Boris, membre du groupe, interrompt sa camarade :

- "Dis-donc Julie, qui a écrit ça ?"
Julie le regarde, les yeux ronds, et ne sait pas. Peut-être Karine, qui est absente aujourd'hui ? Pourquoi ?
- "Tu entends ce que tu lis ? C'est .... tu peux pas dire des trucs pareils" dit-il le plus gentiment possible.
Emilie, depuis la salle, intervient :
- "C'est carrément raciste"
- "C'est des propos d'extrême-droite ! Qui a écrit ça ?"

L'exposé s'arrête. J'interviens d'abord pour mettre en évidence les règles du travail en équipe :
  • se préparer à l'absence impromptue de l'un ou de l'autre, en choisissant des outils de partage ou en échangeant les notes régulièrement. 
  • relire et écouter de manière à la fois bienveillante, mais aussi critique et constructive le travail des autres membres du groupe, c'est-à-dire accepter collectivement la responsabilité du travail du groupe
  • Et ne pas se taire lorsqu'on n'est pas d'accord : s'exprimer,  au risque de se tromper. Si la règle n°2 est respectée, on ne peut qu'en tirer bénéfice.
Après le rappel de ces quelques règles que je prendrai la précaution de rappeler en début d'année prochaine à TOUTES mes classes,  nous démontons ensemble les arguments d'extrême droite.
Je suis fière de ces élèves. 

mardi 17 mai 2011

Prise de notes

J'ai une classe de seconde sympa mais pas très bosseuse. Avec dedans un élève (appelons-le Benjamin) sympa mais pas très bosseur. Et encore moins en éducation civique.
Aujourd'hui, présentations orales sur le nucléaire pour préparer un débat. Ceux qui ne passent pas au tableau prennent des notes. Certains ont préparé un travail écrit sur openoffice, d'autres ont utilisé Etherpad, d'autres ont créé un petit diaporama.
Mais pour la prise de notes, c'est un papier qui reste presque toujours vierge, et un crayon qui reste suspendu au-dessus dudit papier.
Sauf Benjamin. Benjamin, je l'entraperçois entre les ordinateurs qui joue ostensiblement sur son ipod. Je m'approche pour le surprendre (j'aime bien le voir sursauter) et ...
Et je repars aussitôt pour aller chercher le mien, de smartphone, dans mon sac, afin de prendre une photo de ce petit miracle :

Oui oui oui vous pouvez zoomer : Benjamin prend des notes !
Il interrompt les exposés pour faire répéter (pendant mes cours, d'habitude, il papote), il demande des éclaircissements, bref, il prend des notes.
Me demandez pas si c'est le sujet qui l'intéresse ou la prouesse d'ordre olympique de prendre des notes sur l'ipod.