mercredi 31 août 2011

Ludovia Jour 3


Dur réveil ce matin après la fin de journée d'hier... 
Ok c'est de ma faute : chargée d'animer un des barcamp du soir sur la mobilité, j'étais aussi inscrite à l'activité (facultative) "initiation au trail", vous savez : courir comme un dératé sur les chemins de randonnée (oui je sais la photo c'est de la route mais Sébastien le photographe n'avait pas pris ses basket). (photo Ludovia)
Je rappelle que Ludovia, c'est à Ax-les-thermes, en Ariège, dans les PYRÉNÉES, une chaîne de MONTAGNES avec de gros DÉNIVELÉS. Et animer un barcamp juste à côté du brillantissime animateur Mario Asselin, avec des gens (pourtant adultes, parfois même enseignants ou membres des institutions liées à l'éducation) venus boire des bières et bouder bruyamment le travail en cours... Pas fastoche. Il faut dire que François Cadeau, Anne Aurélie Le Mat (tous deux de la société Logosapience) et moi-même avions placé la barre d'entrée un peu haut : "Dessinez l'application mobile de vos rêves". Certains ont relevé le défi avec brio, évoquant les possibilités de surmonter les obstacles à la mobilité : ils rêvent d'un support dont la batterie ne serait jamais déchargée, qui serait connecté tout le temps. Quant à l'application, son format serait universel et multiplateforme, ergonomique, avec des fonctionnalités de géolocalisation, de prise de photo, vidéo, son, texte (faire entrer le monde dans son smartphone - ou sa tablette), bref, un outil universel.
Photo @2vanssay (y'en a une encore mieux de @batier mais il ne l'a pas publiée)
Plus précis, le deuxième groupe a proposé une application qui va plaire à Laurence Juin : elle permettrait aux élèves en stage de préparer leur rapport de stage en prélevant sur site des photos, des vidéos, des sons géolocalisés, d'écrire depuis leur téléphone leur rapport de stage, et enfin de publier ce rapport sous forme de site web à partager avec les camarades de la classe. 
L'équipe de Logosapience a ensuite partagé avec nous les difficultés à surmonter pour passer d'une application de laboratoire de langue à une application mobile : comment permettre aux élèves d'accéder au matériel multimedia fourni par l'enseignant, comment stocker et permettre l'échange du matériel multimédia produit par l'élève en dehors de la classe ? Résultat de leurs efforts : leur logiciel Wizzbe. Je dois féliciter François et Anne Aurélie qui ont su respecter les règles du barcamp et s'intégrer dans les problématiques annoncées, exercice difficile s'il en est. 
Quelques questions sont apparues de ces témoignages : Comment favoriser la mobilité des apprentissages ? Quels outils détourner pour enseigner hors la classe lorsque les outils manquent ? Quels matériels sont le mieux adaptés à la mobilité : tablettes, téléphones, petits ordinateurs ?
Questions restées sans réponse faute de pouvoir s'entendre dans le brouhaha du chapiteau.
Ce matin donc en meilleure forme, j'ai répondu aux drôles de questions de Thierry Foulques sur les réseaux sociaux. Et depuis j'écoute le colloque scientifique : Une présentation de Michelle Pieri qui constate qu'en Italie, on parle beaucoup de Mobile Learning sans pour autant le pratiquer. Elle a donc développé une activité de Mobile learning intitulé MoUle : Mobile and ubiquitous Learning pour un groupe d'étudiants de l'université de Palerme. Basé sur les Smartphone et appareils mobiles, elle consiste en une série d'activités basées sur l’exploration d’un lieu. Il s'agissait de créer, par groupe, un hypermédia pour chaque sujet spécifique lié à un lieu. Elle dégage de l'expérience quelques obstacles que le barcamp d'hier avait déjà relevés : lenteur d’accès aux infos et de téléchargement, problèmes d’ergonomie, de synchronisation... Mais un soutien de la part des étudiants qui ont malgré tout apprécié l'expérience. 
Eric Sanchez a ensuite brillamment présenté Clim@ction : des références solides, un bel esprit d'analyse, je ne travaille pas avec n'importe qui moi !  je me sers des tweets de Stéphanie De Vanssay (@2vanssay) pour résumer : 


Le jeu permet d'exercer sa créativité, d'assimiler la réalité dans sa complexité, mais sans risque (Piaget), et ce depuis longtemps puisque Labruyère parlait déjà de "jeu sérieux". L'apprentissage ludique est un processus adaptatif, les apprentissages naissent des interactions. Seulement les apprentissages réalisés lors du jeu sont de type procédural, et il est nécessaire de prévoir une étape de debriefing pour fixer les apprentissages, institutionnaliser les connaissances et passer aux compétences. Le jeu Clim@ction est présenté sur le site de l'IFÉ. Il s'agit d'un jeu de rôle, qui n'amène pas une solution simple mais une multiplicité de solutions possibles, élaborées grâce à la collaboration entre élèves, avec l'aide d'experts, qui ont accepté de rentrer dans le jeu, et des enseignants à la demande. Les élèves ont apprécié le côté immersif du jeu mais il les a aussi un peu stressés : l'enjeu est devenu très concret et réel, la frontière entre le jeu et la réalité s'est faite plus floue. Les élèves ont modifié les règles du jeu : ils ont décidé de sortir de la compétition et de présenter un projet global, plus adapté à la problématique. Pour les enseignants, ça n'est pas beaucoup plus facile (j'en sais quelque chose) : véritables ingénieurs pédagogiques, ils doivent être capables de réagir à des situations inattendues.

Bon, ces compte-rendus sont incomplets mais il faut que je file voir Pascal Nodenot. Trop de gens chouette ici on n'a le temps de rien.

Ludovia, jour 1 et 2

A Ludovia, je suis là pour bloguer mais ... j'ai pas le temps. Trop de trucs intéressants à écouter, trop de gens avec lesquels discuter et débattre, et 24 heures seulement dans la journée. Tout de même, un petit billet de blogue pour vous raconter.
Jour 1 : Retrouvailles
Arrivée dans un train de "Ludioviens" avec entre autres les blogueurs Mario Asselin, Laurence Juin, le chercheur de l'IFE Eric Sanchez et Guy Menant du REPTA. Beaucoup de têtes connues, comme une famille un peu hétéroclite tout de même, qui a envie de se retrouver pour bavarder éducation et technologies.


Jour 2 : les choses sérieuses ont commencé

Une première table-ronde nous remet dans le bain et ça y est, je me souviens du seul défaut de Ludovia : tout le monde veut y être et se faire entendre et du coup, il y a trop de monde dans les tables-rondes qui deviennent, sauf habileté et impertinence particulières de l'animateur, une succession de présentations consensuelles et peu discutées. Tout de même, je lève mon chapeau à Mme Luciani-Boyer qui a su oublier la gueule de bois à propos des ENT dans le primaire, en appelant à un Espace numérique d'échange ouvert sur les parents et sur le territoire. Un espace numérique de plaisir d'apprendre et d'échanger me conviendrait mieux à moi aussi ! Mon compte-rendu est sur le site de Ludovia, avec une superbe vidéo de plage.

J'ai ensuite exploré les Explorcamp. En l'absence de rotation organisée, un peu difficile de s'asseoir à une table pour écouter les présentations. J'ai pu néanmoins visiter deux tables :



Monuments 2 Mémoire 
Deux sympathiques enseignants nous présentent leur projet Monuments 2 mémoire, un wiki à disposition de la communauté éducative à propos des lieux de mémoire (en cours de finalisation).

Sur ce wiki, les enseignants pourront inscrire leur classe et faire rédiger aux élèves des des fiches sur le monument aux morts de leur village ou, pourquoi par tout autre lieu ou objet de mémoire (localisé).
Depuis la page d'accueil, l'entrée se fait par une carte dynamique qui donne accès aux fiches de chaque lieu. Les concepteurs ont mis en ligne des fiches type pour aider les élèves à remplir les champs, à géolocaliser, à mettre en ligne sur ce wiki de chez Wikimedia. Il faut en effet s'accomoder d'un éditeur de texte qui n'est pas Wysiwyg et  insérer dans l'article les balises de mise en forme. Ce qui semble être un obstacle permet pourtant de travailler l'item C.2.4 du B2i collège : Je m'interroge sur les résultats des traitements informatiques (calcul, représentation graphique, correcteur...).
Ce projet est soutenu par le CDDP Aveyron et Tarn, et par le CRDP midi Pyrénées



Jeux "sérieux" ou jeux pour apprendre


J'ai ensuite écouté Julien Llanas nous parler du programme éducation au jeu vidéo de l'académie de Créteil


Trois axes : "bonnes pratiques" (edugame initiatives"), recherche, développement


Initiatives :
Par discipline, des artciles de veille avec propositions de jeux
retours d'expériences et analyse
La cité romaine, l'Oricou pour travailler l'estime de soi

Challenge : 
Concours de création de jeux vidéo : les enseignants sont formés et accompagnés dans la direction de projet, l'ingénierie et le développement.

Base : Base de données (pas encore ouvert)
Permet de capitaliser le travail des enseignants : jeux indexés, testés, avec retour de pratiques

Edugame Lab :
Réseau européen de recherche sur le jeu : comment évaluer un jeu (création d'un outil d'évaluation) etc ...
Edugame Studio
L'enseignant propose un projet de jeu et ils trouvent des partenaires et des financement pour développer

Julien Llanas constate une timidité des enseignants à partager leurs expériences sur le jeu, et la difficulté à impulser les usages du jeu en classe. J'ose rappeler cette expérience avec les élèves de seconde : L'école n'est pas équipée pour accueillir le matériel de jeu (les consoles) et les élèves trop habitués à recevoir (de la part des profs et des parents) une image négative du jeu vidéo pour faire confiance aux qualités pédagogiques de ce type d'activité.

J'ai été impressionnée par cette énergie et ces moyens donnés au jeu par l'académie de Créteil et ses partenaires, et j'espère que ce projet trouvera très bientôt l'ampleur nationale qu'il appelle de ses voeux.

samedi 27 août 2011

Twitter expliqué à ...

... À Roxane, par exemple, qui vient d'arriver sur Twitter et se demande comment ça marche. Ou à ma maman, ce matin, qui me posait aussi la question. Pour répondre, fastoche : Internet est plein de sites qui expliquent très clairement le principe de Twitter, par exemple :


On trouve aussi des lexiques Twitter comme celui de Presse-citron ou cet autre très court qui en vaut bien un autre, et même un article qui explique à quoi ça sert, Twitter, en vrai dans la vraie vie.
Mais voilà. Je l'aime bien, Roxane, et ma maman je l'adore, alors ces pages froides et sans émotion ne me satisfont pas vraiment, et puis j'ai envie de leur expliquer Twitter avec mes mots à moi, mes émotions à moi, toute ma subjectivité.
Mon Twitter, donc. 

Pour moi, Twitter, c'est ... des gens : un ensemble disparate (mais pas totalement) de gens que je suis et qui me suivent (ou pas), que j'ai choisis soit parce que je partage quelque chose avec eux (un lien dans la vraie vie ou un intérêt commun, du tricot à l'éducation). Parfois on papote et ça doit être pénible à suivre :
Moi : "Bonjour Twitterworld ! Grasse mat ce matin !"
Machin : @cjouneau "salut moi aussi grasse mat' mais là faut que je fasse à manger. Belle maman à midi"
Moi @machin : "Essaie le saumon magasine au barbecue trop bon"
et caetera et caetera. 
Parfois on partage :
Moi : "Encart de Libé, je tilte sur "la jeune fille n'est pas femme de ménage". Pq cette remarque ? Parce qu'elle est noire??? http://t.co/173Luop"


Machine @cjouneau " elle va pas être secrétaire à la défense non plus, en plus il parait que son père est un intégriste (muslim of course) ;-)"
et sur l'éducation, ça peut être vraiment intéressant. Parfois la conversation se poursuit ailleurs, pour avoir plus de place : sur Skype ou autre outil de clavardage ("chat"), par courriel, ça dépend un peu du nombre de gens et de leurs habitudes en matière de communication numérique. S'organisent parfois sur Twitter de véritables conversations collectives, comme le "#ClavEd". Dans ce cas, il suffit d'ajouter le code # suivi du mot-clef choisi collectivement (comme vous l'avez fait pour #crapweb2). En cliquant sur le mot clef, on accède à l'ensemble de la conversation (enfin dans un monde parfait parce que quand les tweets sont trop nombreux, tintin !). Ces conversations générales sont sympas mais 1- un peu difficiles à suivre (50 tweets à la minutes, c'est la limite maximale de ce que mes yeux peuvent suivre) et 2- pour les gens qui te suivent et ne sont pas intéressés par la conversation, c'est rien pénible.
Sur le même principe, lors des conférences, les auditeurs prennent des notes sur Twitter, notes qui se mélangent avec les réactions des "followers" (les gens qui suivent le mot-clef de la conférence sur Twitter). Ces conversations et ces conférences font parfois, trop peu souvent cependant, l'objet de compte-rendus qui sont la base d'une réflexion peut-être plus aboutie que ce que rendent possible les 140 caractères.

Et puis Twitter c'est aussi la "sérendipité". Parce que tu t'abonnes aux flux de gens qui ont un de leurs centres d'intérêt en commun avec toi, mais qui en ont des tas d'autres aussi que tu découvres, et qui connaissent d'autres personnes que tu rencontres toi aussi. Quand je dis "rencontre", je parle dans un premier temps de lecture numérique, puis de conversations, et puis souvent de rencontres réelles et très riches. Parfois ces rencontres sont organisées, ce sont les "Tweet up", Tweetaperos" ou quel que soit le nom qu'on leur donne. Je m'y suis souvent ennuyée. Parfois tu retrouves l'un ou l'autre de tes contacts dans un événement (@Karinesperanto aux Assises du Crap en octobre à Paris) ou tu décides d'organiser la rencontre, pour le plaisir d'une sortie découverte. Ces rencontres virtuelles et réelles t'offrent des opportunités très concrètes et enrichissantes : un échange entre deux classes, un travail en commun entre deux enseignants ou entre toi, enseignante, et un autre, peintre, architecte, paysagiste, avocat, ou que sais-je. Et parfois, c'est le hasard, une réelle amitié. Comme à la chorale ou dans une troupe de théâtre !

Last but not least : Twitter, c'est un regonfleur de moral. Sur Twitter, la sociabilité est un peu à l'américaine : nous formons une communauté soudée dans le monde virtuel (parfois ça se traduit dans le monde réel : des fleurs qui arrivent près d'un lit d'hôpital, quelqu'un qui vient te chercher là où tu es en panne de voiture, plus rarement on t'amène un café au lit faut pas trop en demander quand même), ça semble un peu artificiel : tout le monde s'extasie sur ton dernier billet de blog pourtant pas si terrible, tout le monde trouve géniale la dernière activité péda que tu partages, et te remonte le moral quand tu sors de cours complètement démoralisée. Et pourtant ça ne s'arrête pas là : après les compliments qui font vraiment carrément beaucoup de bien (je ne vais pas mentir ce serait pas beau !), viennent les remarques constructives qui te permettent d'avancer. Les coups de main, et jamais les coups de pied. La sociabilité américaine sans l'hypocrisie (ou alors avec une hypocrisie qu'on ne voit pas, ce qui revient au même). J'ai très vite quitté les forum qui, jusqu'à il y a quelques années étaient les chouchous du web, parce qu'on se fait tout le temps engueuler :

Moi : "Salut, je cherche des informations sur l'histoire de l'Afrique au Moyen-âge ! Quelqu'un ?"
Historien_en_folie : "Tin yenamar des glandu qui regarde pa ds les ancien topic ! On é pa à la FNAC ici !"

(Tu auras remarqué que l'orthographe de Twitter n'a rien à voir avec celle des forum. Il est très (très) mal vu d'écrire en langage SMS et quand tu fais des fautes d'orthographe, il y a même parfois des robots ( des "bots") pour te corriger).

Sur Twitter, à la question :
Comment récupérer un vieil IBM ThinkPad dt on a perdu le mdp supervisor ? CD dispo. urgent pr un gars de cette île perdue du Kenya. thks 
(oui, on peut tolérer les abréviations quand même mais pas trop)
On me répond :
Equinoxfr_org @cjouneau comme ça dangerousprototypes.com/2011/06/10/ibm… #diy
(et c'est pareil pour la plupart des sujets)

Je te passe les 140 caractères qui te permettent de savoir très très vite si c'est du lard ou du cochon, si le contenu est susceptible de t'intéresser ou pas.
Enfin, Twitter c'est parfois des jeux (la #photodevinette ou des jeux littéraires sympas), des rigolades, des flâneries (j'aime bien le compte @homophonies par exemple, mais il y en a sûrement d'autres).


Pour conclure, je ne crois pas que Twitter soit indispensable. On peut s'informer, avoir des collègues et des amis, faire des rencontres et se distraire autrement. Twitter ne convient sûrement pas à tout le monde : il faut accepter de "rater" des bouts de conversations et des informations qui passent, de ne pas être "connecté" en permanence, et faire son deuil de pouvoir tout lire et tout suivre. C'est comme quand tu es à côté d'un bavard intéressant : au bout d'un moment, il parle il parle et toi, tu zappes, tu n'écoutes plus, ton esprit vagabonde, et puis ton oreille capte un mot qui t'intéresse et ton attention se rebranche. Twitter, c'est un peu pareil pour moi. Mais je connais des gens qui ne supportent pas les bavards, même intéressants...
En somme, il en est de Twitter comme de tous les outils : on aime ou on n'aime pas s'en servir. C'est un peu comme pour écrire : d'aucuns préfèrent les stylos billes, d'autres les plumes. Certains DÉTESTENT les feutres. Pour s'informer, échanger, communiquer, j'aime Twitter, mais je comprends que d'autres détestent, ou préfèrent les blogues, les sites internet, les agréagteurs de flux ou le journal.



Je ne suis pas bien sûre d'avoir répondu à la commande de Roxane ni à celle de ma mère... mais j'espère leur avoir été utile. A elles ou à d'autres !



vendredi 26 août 2011

L'école des sorciers

Une nuit que mon esprit pourtant endormi travaillait à préparer ma présentation au colloque ICT and Informatics in a Globalized World of Education (celui dont j'ai parlé dans les deux billets précédents), j'ai enfin compris ce qui me gênait dans l'école d'aujourd'hui.


Imaginez que nous vivons dans le monde de Harry Potter. Nos enfants sont des sorciers, avec leur baguette magique, leur balai (de sorcier, bien entendu) et quelques pouvoirs surprenants qui leur permettent de changer leur écritoire en souris grise ou de faire léviter leur prof.


Notre école, c'est Poudlard (mais en mieux parce qu'on a fait des progrès en pédagogie depuis 1940, quand même). 
Mais voilà... Que diriez-vous si dans cette école de Poudlard étaient enseignés les programmes moldus, avec des profs moldus ? Autrement dit, des programmes et des enseignants qui méconnaîtraient, voire ignoreraient les compétences de ces enfants, ne les formeraient pas à un usage raisonné de leur baguette magique, ne leur inculqueraient pas les règles d'usage de la magie, ne leur apprendraient pas à se défendre contre les forces du mal ?
Ben voilà, je crois que si vous remplacez "baguette magique" par "smartphone" et "balai volant" par "ordinateur", vous voyez où je veux en venir ?

J'espère qu'à Ludovia, tous ensemble (profs, décideurs divers et vendeurs de matériels) nous trouverons des pistes pour améliorer notre Poudlard national avec des programmes magiques, des équipements magiques et une formation professionnelle qui permettent aux enseignants de ne pas être très vite métamorphosés en souris volante (wingardium leviosa) et muette (silentio) avec des oreilles agitées dans tous les sens (Foloreille). C'est urgent, certains d'entre nous ont déjà eu à subir le sortilège de deprimo...



vendredi 19 août 2011

Jouons aux lego pour apprendre comment fonctionne un ordinateur

Ben oui, moi aussi je croyais que c'était hyper sérieux cette conférence mais ... voilà une photo de l'atelier du matin.




Vous ne rêvez pas : des profs, un chercheur et je ne sais qui encore en train de jouer aux lego. La première épreuve a été remportée haut la main par Eric Sanchez qui a su faire un canard en moins de trois minutes. La dame qui a perdu (son canard ressemblait à un pont, mais à sa décharge elle n'avait jamais vu de canard) a gagné l'épreuve suivante : reconstituer au choix le transfert des données sur une clef usb, la numérisation des images, la défragmentation d'un disque dur ou ... zut j'ai oublié mais vous voyez un peu le genre. Un truc pour les profs de techno (mais IIGWE ça veut dire : Internet AND informatics, alors il faut un peu d'informatics) que la dame a brillamment réussi parce qu'elle savait visiblement beaucoup mieux comment fonctionne un memory stick qu'un canard...
On a aussi joué à être un microprocesseur et moi j'étais l'unité centrale, le chef quoi...
Bref on a bien rigolé et je me suis dit qu'on pouvais faire des trucs similaires en histoire ou en géo (construire un territoire en légo ? jouer à être la démocratie athénienne ?).
Je n'ai pas le temps de vous raconter la conclusion du colloque parce que :
1- j'ai pas tout écouté je twittais avec l'atelier web 2.0 des Rencontres du Crap et j'ai beau être multitâche, je suis pas non plus WonderWoman
2- Quand on est à Mombasa on passe pas sa soirée devant l'ordinateur
3- La prochaine fois vous soumettrez un papier et vous verrez par vous-même. C'est à Manchester en juillet 2012, c'est moins sexy mais ce sera très sympa aussi vous verrez !
Quand j'aurai le temps, je vous raconterai aussi l'atelier web 2.0 de Steve Wheeler, très marrant, on s'est balancé des boulettes de papiers, collé des post it partout, marrant comme tout.
Pour conclure, des gens très généreux et bosseurs, ces membres de la commission technique n°3 de l'IFIP !


jeudi 18 août 2011

Bibi à l'IFIP (plutôt que Caroline à la plage)

 Ces derniers jours, je participe à la conférence annuelle de l'IFIP titrée IIGWE, à Mombasa, Kenya. L'IFIP c'est pour International Federation for Information Processing (http://www.ifip.org/) et se présente comme une organisation multinationale, apolitique, concernée par les technologies de l'information et de la communication et des sciences, sous l'égide de l'Unesco. Ils organisent des conférences pour réfléchir sur le sujet en mêlant scientifiques, praticiens, décideurs. La conférence IIGWE (ICT and Informatics in a Globalized World of Education) est organisée par quelques groupes de travail du comité technique de l'éducation (TC3).



En arrivant, j'ai été un peu surprise de l'ampleur de la conférence : j'ai vu sur le programme des gens du monde entier, de Finlande, du Canada, des Pays-Bas, de Suisse, de Lituanie ou d'Ethiopie (et du Kenya, bien sûr). Et pourtant seulement une cinquantaine de participants dans une grande salle vide, presque tous des conférenciers, d'ailleurs. J'avoue que, partant du principe que plus on est de fous plus on rit et plus on est de cerveaux mieux on réfléchit, j'ai été un peu déçue. Et puis les interventions ont commencé et j'ai compris : on n'est pas ici pour rigoler (bien que, on peut pas s'empêcher) et vous savez quoi : on bosse dur ! On enchaîne conférences et ateliers, communications et panels et chacun parle, pose des questions, suggère… une sorte de barcamp en quelques sorte, un barcamp de conseillers des systèmes éducatifs, de profs, de chefs d'établissement, mais sans les post-it de Mario Asselin et sans les bruits de vaisselles du bar du casino de Ludovia.

On parle donc ici d'intégration des TIC dans l'éducation, et en premier lieu du contexte : le rôle des jeunes dans la révolution des médias sociaux et son impact sur le développement de la démocratie en Afrique de l'Est (Alaaz Kasam), la puissance des médias sociaux pour l'éducation (Steve Wheeler), la perception des technologies par les étudiants d'une école de Mombasa (Enos Kiforo Ang'ondi). Ma communication : Web 2.0 is Challenging School qui fait un peu la transition avec le deuxième type d'interventions, plutôt axée sur les moyens d'intégrer les TIC dans l'école. J'ai adoré cette présentation du lycée Helen Parkhurst Dalton School aux Pays Bas par son directeur Pieter Hogenbierk. Son école est partie de cinq piliers qui la soutiennent :
- confiance dans les "apprenants" (mon copain Jacques va me tuer, alors disons "élèves")
- responsabilité et "accountability"
- apprentissage collaboratif
- accent porté sur les compétences
- auto analyse et feed-back

et a ensuite développé tout le reste (enseignement, emplois du temps, outils etc…) de façon à développer ces piliers. Autrement dit : une école qui repose sur un projet pédagogique, comme l'est le collège Clisthène, le lycée expérimental, l'école du futur de Philadelphie.
Le résultat : des élèves autonomes pour des cours de 70 minutes pour (selon les cas) permettre une pédagogie de projet ou pour inciter les enseignants à varier leurs approches pédagogiques (ou les deux !), une semaine par trimestre pour un projet au long cours centré sur la citoyenneté active et impliquée, et du coup un usage des technologies assez important. L'école s'évalue ou se fait évaluer régulièrement suivant une grille plutôt intéressante.
OK, d'accord, ils sont super bien équipés. Je vous dis pas, vous allez être malades. Simplement un indice : les salles informatiques, c'est fini. FI-NI. Equipements mobiles.

J'ai entendu aussi Betsy Dokter présenter un projet des archives d'Amsterdam qui accueille des jeunes pendant une semaine (toujours cette semaine d'éducation à une citoyenneté active qui semble être de règle aux Pays Bas) pour rencontrer des personnes âgées et augmenter la section "historique" du site Fotorally.eu grâce aux photos des pensionnaires et aux compétences technos des jeunes. La poster session m'a aussi permis de rencontrer des enseignants d'Afrique de l'Est qui utilisent les technologies de manière très réfléchie dans des conditions d'enseignement parfois extrêmes. Ceci dit j'ai l'impression que les écoles sont plutôt bien équipées en ordo, même dans la campagne… (voir l'album photo, confirmé par les témoignages ici). Manque juste l'électricité parfois ! 
Eric Sanchez (oui oui, @australopitek) a présenté son travail de recherche sur les jeux dans les apprentissages qui a suscité un certain engouement tant pour la méthodologie de recherche (oui oui il construit sa recherche avec les profs, pas tout seul dans son coin et non non, il ne compare pas deux "populations" d'élèves, l'une AVEC, l'autre SANS (TIC, jeux ou que sais-je) que pour l'idée de permettre aux profs de développer leurs propres jeux.

Enfin, la dernière (mais non la moindre) partie du travail concerne plutôt la gouvernance : comment (et pourquoi) développer la coopération internationale en éducation ? Comment former les enseignants à distance ? Quelle formation pour les décideurs en éducation, technologie, innovation ? Quels programmes pour l'école ? Quelles compétences développer pour une éducation adaptée aux prochaines dizaines d'années ?
Cette conférence est accueillie dans la superbe Aga Khan Academy of Mombasa mais, bien sûr, nous avons visité une série d'autres écoles qui nous ont fait découvrir d'autres réalités, j'en parlerai plus tard…

PS J'ai des difficultés à me connecter : on travaille tout le temps, sans wifi (la connexion est filaire). Je mettrai donc tous les liens vers les conférences, les présentations etc… quand j'aurai le temps de les chercher, si ça ne vous dérange pas...

Ecoles de Mombasa

Afin de nous donner une idée un peu plus réaliste des conditions d'enseignement au Kenya (je veux dire : pour qu'on n'imagine pas que tous les élèves kenyan apprennent dans le marbre et la climatisation), les organisateurs locaux du colloque ont organisé quatre visites d'écoles.
Nous avons commencé par celle qui nous accueille : une école fondée par Aga Khan, dirigée sous le contrôle de sa fondation par Rob, un directeur australien, pour accueillir des enfants du primaire à la préparation à l'université, jusqu'à la formation des enseignants. 20% des élèves sont très pauvres et voient leurs études financées par Aga Khan, et bien évidemment ils sont choisis au mérite. Les enseignants sont Kenyans mais aussi américains, néo zélandais, etc… et triés sur le volet. Des conditions de travail idéales, depuis les salles de cours, la bibliothèque, les labos d'informatiques, une piscine, une salle de sport à faire baver mes anciens collègues de Raismes…


La Mviti boys school (un collège-lycée) est plus modeste : dans un quartier pauvre, des locaux propres (mais pas préparés pour notre arrivée). J'ai apprécié le "moto" de l'école (la devise) sur la façade et les règles et objectifs de l'enseignement affichées sur le mur. Encore une pensée pour Jacques et mes collègues de SVT et de physique du lycée lorsque j'ai visité le labo de sciences et sa "réserve". Les gars - les filles, interdiction de râler à partir de maintenant… ou alors argumentez ! ;-) Un labo d'informatique tout neuf avec un technicien pour s'en occuper (là, on peut pleurer, collègues du lycée).






Plus loin, l'école primaire publique Marycliff borde un bidonville. Bien qu'en vacances, quelques filles ont enfilé leur uniforme pour nous accueillir et nous faire visiter fièrement leur école primaire. Leurs salles préférées : le labo d'informatique avec ses 4 ordinateurs éteints parce l'école ne peut pas payer sa note d'électricité, et la bibliothèque financée par des néerlandais. Ces jeunes filles ont une vie difficile mais beaucoup d'ambition, c'est sûrement ce qui les sauvera. Ici, pas de surpopulation : les écoles privées alentours (surtout religieuses de toutes sortes) on capté les trois quarts des élèves…






Pour finir, une école de village, 2200 élèves, 46 enseignants, plus de 50 élèves par classe. Des classes assez rudimentaires, mais l'aide de partenaires publics et privés leur a permis d'avoir une salle informatique mieux équipée que certaines salles info que je connais. Une partie des élèves dort sur place, 26 filles dans la chambre que j'ai visitée, sur des matelas posés par terre, un tableau pour réviser et hop ! ça rigole.
J'ajoute que TOUS ces élèves parlent un anglais parfait (j'avais honte du mien) et suivent les cours en anglais sauf un en Swahili.





Conclusion : des salles de classe pourries et surchargées, mais des élèves et des enseignants hyper motivés (ceux que j'ai rencontrés, pendant les vacances scolaires tout de même) et un équipement informatique (et seulement informatique) pas négligeable finalement. Une enseignante rwandaise me disait que de nombreuses écoles au Rwanda sont équipées de postes informatiques… et un enseignant de l'Est kenyan opinait pour son pays. A confirmer !