jeudi 3 octobre 2013

Les MOOC, évolution ou révolution ?


 Ce billet a été initialement publié sur le tumblr ouvert pendant le Blend Web Mix. Il est lié à la table-ronde sur les Mooc organisée le 2 octobre durant cet événement, autour de C. Batier, de M. Lebrun et A. Mille.

Il faut commencer par définir les MOOC : ces bêtes-là ne sont pas si nouvelles, vous allez voir. Un mooc c’est un Massive Online Open course. Mais si mais si, vous connaissez déjà : open course, c’est, depuis le moyen âge, des cours que les enseignants donnaient dans les tavernes pour échapper à la censure de l’Eglise. C’est aussi le Collège de France qui accueille tous ceux qui entrent, même les clochards, sans distinction, depuis sa fondation en 1530. C’est enfin plus récemment les universités populaires, et l’université de tous les savoirs qui diffuse ses cours en ligne.
La différence avec les Mooc, c’est le côté massif. Même les cours de Roland Barthes ou d’Yves Coppens ne peuvent se comparer aux 9000 participants du mooc Gestion de projet de Centrale Lille ou des 15000 du mooc HtML 5 de openclassrooms. Et on ne parlera même pas des mooc du MIT aux dizaines de milliers d’apprenants.

Deux grands modèles de Mooc coexistent sur la toile, et se superposent aussi parfois
  •  Le Xmooc suit le modele du cours traditionnel version numerisée (videos du cours, trucs à lire) avec des examens en ligne
. C’est le mooc HTML5 par exemple.
  • Le Cmooc, connectiviste, vise l’apprentissage par les pairs, à l’aide du travail par projets. C’est le Mooc Itypa par exemple, ou le Mooc Economie du Web.

Comment ces moocs sont-ils financés ?

Par des financements universitaires, mais aussi par des capitaux privés et des fondations. Et parfois par… Rien, comme c’etait le cas du Mooc itypa l’an dernier.

Ces Mooc se multiplient : outre Coursera, Edx et Udacity, on voit naître FutureLearn d’initiative britannique pilotée par l’open University. 
En France : itypa, gestion de projet par Remi Bachelet, économie du web par JM Salaün existent déjà, polytechnique et la Sorbonne annoncent des cours. Ce matin la ministre annonçait l’ouverture de la Plateforme FUN qui proposera une vingtaine de mooc.
Lyon est largement leader dans le mouvement des mooc français : la plateforme Claroline Connect pour Itypa saison 2 er elearnest développée à Lyon, le 
Mooc Economie du web
 aussi, et d’autres en préparation à lyon et en Rhône Alpes.

Mais pourquoi maintenant ? Après tout, les technologies qui permettent la publication et meme l’echange existent depuis longtemps. Pour Alain Mille c’est la familiarité avec les outils qui fait que l’offre decours rencontre maintenant un public de gens qui ont une appétence nouvelle pour la connaissance.

Est-ce que ces mooc vont révolutionner l’enseignement ?

Marcel Lebrun se souvient des années 1980 : déjà l’ Enseignement assisté par ordinateur devait révolutionner l’apprentissage. Mais un outil n’a pas de valeur positive ou négative en soi. Enseigner (ce que font les xmooc) n’est pas équivalent à apprendre. il faut donc former les enseignants pour qu’il apprennent à apprendre. Il y a d’avantage une révolution culturelle dans notre rapport à la connaissance.

Pour Christophe Batier se pose la question de la valeur du diplôme face aux certificats. Ce processus de certification commence à s’organiser.

Comment gérer la masse des étudiants ? 


 On passe avec les Mooc du groupe (fermé, hiérarchisé, temporalisé) à la communauté plus large, et même au réseau 
moins hiérarchisé, intergénérationnel, sans temporalité, avec des problématiques liées à la notion de visibilité, de validation par les pairs etc… Ces problématiques nouvelles nécessitent des outils pour visualiser, repérer, identifier les personnes pertinentes sur un sujet…
 sur Claroline, son équipe a imaginé des badges qui permettent de repérer les gens. Pour les obtenir, quelques règles simples : la validation par au moins 10 personnes, ou un certain résultat à des tests… Ils développent aussi des outils d’analyse critique.

Alain Mille présente quelques défis liés aux Mooc. Le premier, c’est d’intégrer ce que l’on sait déjà dans les mooc sans réinventer la poudre. Les chercheurs doivent ouvrir leurs étagères
 ! De son côté ils pratiquent une méthode appelée Design Oriented Research : les chercheurs s’intègrent dans l’equipe de conception donc ouvrent leurs étagères et apprennent aussi de la demarche mooc.
D’autres enjeux tournent autour de l’evaluation, l’engagement, …

Pour Marcel Lebrun, les xmooc sont plutôt dans les savoirs cristallisés. Les cmooc permettent de développer des compétences fluides: travail en équipe, esprit critique, communication. C’est plutot une évaluation formative qui va se mettre en oeuvre sur les mooc. Les apprenants vont devoir montrer leurs compétences dans des produits reconnus par une communauté. Un peu comme les chefs d’œuvre. 
Dans le mooc économie du web, nous révèle Alain Mille, est prévu un cahier de cours un peu particulier pour montrer sa compétence. Un portfolio, Alain ?

Les outils 

Quant aux plateformes qui accueillent les Mooc, c’est LE sujet que maîtrise Christophe Batier. 
Les plateformes utilisées jusqu’à présent sont créées par les universites. Elles sont inadaptées qux mooc : fermées, des “teaching management system” plutôt que LMS. 
Claroline connect a été conçue pour être ouverte, pour permettre de créer du contenu et des groupes de travail, partager, collaborer.

L’éducation devient-elle un marché comme les autres ? Quelle est la place de l’université ? 


Les modèles économiques sont très différents, entre les EU où on s’endette pour payer son diplôme, et la France où le diplôme universitaire est gratuit (hors coûts d’inscription à la fac vous fâchez pas). Mais alors Marcel : quelle place pour le campus ? 
Pour la partie magistrale et transmission on est aussi bien en ligne. Que reste-t-il au campus ? Rien ! Dit Marcel. Rien, sauf à changer les rôles et que les enseignants deviennent des accompagnateurs plus que des transmetteurs. Mais, Marcel, le campus reste un lieu pour devenir adulte et faire la transition avec le monde professionnel, et ça, même en faisant une effort, on imagine mal que ce soit un espace numérique qui joue ce rôle sociologique… Alain Mille va plus loin : pour lui, le savoir universitaire se délivre à l’université et étudiant, c’est une activité à plein temps, pas une activité en pointillé. La preuve : les étudiants ne s’inscrivent pas sur les mooc (moins de 10% des mooceurs) et pas pour leur diplôme

Bref, les moocs c’est pour apprendre tout au long de la vie, l’université pour obtenir un diplôme. Moi je ne parierai pas sur la durée de vie de cette situation.

PS j’aurais pu mettre les liens mais tapez les noms dans google et ça marche aussi :-)